CASSANDRE NUMÉRO 63 – ÉDUCATION POPULAIRE

CASSANDRE NUMÉRO 63 – ÉDUCATION POPULAIRE – Sortie le 20 octobre 2005 – Attention tirage limité.
(Pour être sûr de l’obtenir vous pouvez le pré-acheter dès maintenant).


Bonjour,

L’équipe de Cassandre/Horschamp s’efforce de montrer l’importance d’activités et de démarches mal connues qui prennent place dans des lieux où la pratique de l’art reprend sens et puissance (milieu rural, quartiers difficiles, prisons, hôpitaux, hôpitaux psychiatriques…). Elle s’obstine à défendre une vision de l’action culturelle et artistique héritée des inventeurs de l’Éducation populaire et de la première décentralisation théâtrale.

On trouvera dans ce numéro une série d’extraits d’entretiens inédits avec plusieurs des acteurs majeurs en France de l’Éducation populaire depuis l’immédiat après-guerre, parmi lesquels Henri Cordreaux, Gabriel Monnet, René Jeauneau, Jacques Vingler, Jean-Pierre Brière, Claude Decaillot, Pierre Vial, Michel Simon, Christiane Faure, Christiane Guillaume, Michel Philippe. Un retour polémique sur les thèmes fondateurs de l’Éducation populaire, son rapport à la culture, ses implications dans les évènements politiques de l’époque, les rapports amateurs/professionnels et l’outil essentiel que constituaient les stages de réalisation. Certains de ces personnages ont disparu, et nombre des textes que nous publierons auraient pu connaître le même destin.
Mais Cassandre ne se contente pas d’une approche historique.
Pour apporter un éclairage sur la situation contemporaine, des textes de fond proposés par des analystes et des acteurs de cette histoire, tels que Franck Lepage, Jean-Luc Galmiche, Marc Lacreuse, Christian Maurel ou Jean Caune, la mettent en perspective. Les enjeux actuels de l’Éducation populaire apparaissent grâce aux témoignages de responsables de fédérations nationales et d’articles sur les équipes qui suivent le sillon tracé par les pionniers et les grandes figures de ce mouvement, comme Robin Renucci et son association l’ARIA qui organisent depuis huit ans des rencontres théâtrales en Corse. Nous interrogeons aussi les «nouvelles» formes d’Éducation populaire, comme celles que met en œuvre ATTAC.
Où en sommes-nous aujourd’hui, alors que l’individualisme et la dépolitisation semblent être des maîtres-mots, et la démocratie culturelle de moins en moins une réalité ?

Aujourd’hui comme hier, l’Éducation populaire pose des questions fondamentales sur le lien à l’Autre, le partage de la parole et de la culture, sur ce que cela signifie d’être au monde et de vouloir le construire ensemble.
Pour tous ceux dont la réflexion est traversée par ces thématiques (chercheurs et étudiants en sciences sociales et humaines, fédérations et acteurs de ce secteur), ce numéro se veut un vrai outil de travail sur l’avenir de l’Éducation populaire.

LE GRAND CLIVAGE

C’est une épopée, avec ses dieux et demi-dieux, ses héros, ses terres à conquérir, ses démons, ses trahisons, ses déceptions, ses piteuses défaites et ses victoires éclatantes, si belles, à peine racontables. Et surtout le trésor d’une mémoire, essentielle pour notre histoire. Une épopée qu’il faut absolument dire et transmettre pour comprendre comment peuvent se construire présent et avenir. Des personnages extraordinaires la traversent, certains restés tout à fait inconnus, comme Mlle Faure et Christiane Guillaume, d’autres devenus de grands noms dans le champ de l’art « officiel ». Nous n’avons pas voulu totalement démêler les fils de ce fabuleux écheveau dont les enjeux ont fait et feront encore couler beaucoup d’encre. Nous n’avons pas voulu perdre l’aspect vivant de narrations et de dialogues incroyablement précieux pour l’histoire des arts vivants dans notre pays, que Franck Lepage nous a fait l’amitié de nous confier. Pour tenter de prolonger le fil d’une histoire dont notre époque risque de perdre la mémoire.

Rêvées par Romain Rolland, préfigurées par Maurice Pottecher, bricolées par le grand Jacques et ses copiaus, renvendiquées par le Front populaire, un certain nombre d’actions de démocratisation et de décentralisation furent menées dans l’entre-deux-guerres et même pendant l’occupation, notamment avec le Jeune France de Pierre Schaeffer, malgré l’état d’esprit du gouvernement de Vichy. C’est bien d’un fil (parfois) invisible qu’il s’agit. Celui de la soif inextinguible du peuple de Molière pour ce qu’on nomme les «art vivants». Un fil souterrain, presque secret, qui traverse tout, régimes, idéologies, appellations.

Les actions pionnières mêlaient avec la même fougue la foi chrétienne héritée de Copeau, l’enthousiasme scout des comédiens-routiers de Chancerel et l’utopie socialiste de 36. L’immédiat après-guerre appelle un usage de la culture au service d’une réunification symbolique de la France. Un moment-charnière d’une histoire follement riche en la matière, où une valse-hésitation de plus en plus frénétique ne cesse de transformer les appellations, les rattachements d’activités à tel ou tel ministère… Jeunesse et sports est censé ne s’occuper que des amateurs… mais ces amateurs portaient l’essentiel de ce qui a transformé le théâtre dans notre pays. L’Éducation nationale de pédagogie, bien sûr, mais la pédagogie est inhérente à l’art, surtout celui du théâtre. Et les premiers «stages de réalisation» de Jeunesse et Sport, où prédominaient la relation et le collectif, seront un tremplin pour de futurs grands professionnels. À la création du ministère de la Culture, en 59, les choses deviennent assez complexes. Il s’agit de répartir, séparer la pédagogie et l’animation de l’art pour construire un beau ministère. Ça n’est pas simple. Malraux rêve, il a du mal avec les cases administratives. Son puissant et gauche idéalisme fera plus d’un mécontent.

Toutes ces aventures donnent lieux à des multitudes de commentaires, parfois amers, souvent nostalgiques, sur les transformations, les réductions, les appauvrissements, les limitations imposées d’en haut à d’incorrigibles rêveurs. Impossible d’entrer dans le détail de chaque point de vue, à partir de parcours professionnels et humains souvent douloureux, malmenés. Nous avons voulu en garder l’essentiel, le souffle humain, sans trop entrer dans le détail de cette forêt de sigles, ces complexes organigrammes, ces innombrables spécificités de fonctions qui changeaient de noms et de statut à chaque basculement ministériel. Pour faire comprendre l’incroyable richesse d’espérances et d’énergies mises en jeu dans ce qui semblait être, plus qu’un strict projet de politique culturelle, le combat pour un homme nouveau.

Il faut voir ce numéro « spécial» de Cassandre comme un coffre au trésor. Un coffre où gît l’enfance de nos rêves d’aujourd’hui, dans lequel puiser pour y trouver, en complément d’une riche bibliographie, les témoignages très personnels d’acteurs qui traversèrent la grande période des luttes historiques pour l’art et la culture dans notre pays. Cette période qui, de l’immédiat après-guerre jusqu’aujourd’hui, en passant par la création du ministère des affaires culturelles, a vu se transformer la façon dont nos institutions appréhendent le grand clivage. Ce clivage, perceptible à chaque niveau du monde culturel et artistique, qui sépare les «animateurs» des «artistes», les «amateurs» des «professionnels», le «socio-cul» de l’«Art»…qui sépare, en un mot, une pratique artistique «populaire» qui implique le groupe, la rencontre, l’échange, d’un art «noble» porté par des individus d’exception, perçus comme le fleuron culturel du pays… Pourtant, chacun le sait, au-delà des complexes répartitions ministérielles qui illustrèrent, dans ce passé récent, un éternel conflit, l’un ne peut exister sans l’autre. Pas de Jean Dasté, de Roger Planchon, d’Ariane Mnouchkine, de Chris Marker, de Christiane Véricel, ou même de Patrice Chéreau… sans le souffle de cette histoire, ce grand remue-ménage collectif, sans la richesse de ce terreau bourré à craquer d’utopies, de maladresse et de générosité. Lorsque, en 1946, le jeune instructeur du Vaucluse qu’était Paul Puaux, accueillit la «Semaine d’art» proposée par René Char et Jean Vilar à la demande du maire d’Avignon, il le fit en tant que représentant du service public français de l’Éducation populaire.

Ce que nous appelons «art» est tissé de deux fils-maîtres fortement noués. Ce qui vient du groupe et ce qui vient de l’individu. Ce qui émane de la force d’une personne et ce qui naît d’un échange collectif. Ce sont des fils inextricables qu’on dénoue artificiellement, mais qui se croisent sans cesse et donnent, notamment, un Hubert Gignoux, qui, formé chez les comédiens-routiers de Chancerel pratiqua la marionnette dans un camp de prisonniers pendant la deuxième guerre mondiale, et s’engagea dans les actions théâtrales initiées par Jeunesse et Sports avant de devenir en 49 le premier directeur du centre dramatique de l’Ouest. Parcours remarquable d’un homme pour qui seule compte l’exigence pleine et absolue de l’art forgée de deux exigences inséparablement indispensables, celle de la beauté partagée et celle de la relation.

Cassandre

SOMMAIRE DU NUMÉRO 63

CHANTIER ÉDUCATION POPULAIRE : «L’AUTRE MOITIÉ DE LA CULTURE»

p. 2 – LE GRAND CLIVAGE, éditorial de Nicolas Roméas
p. 6 – L’autre moitié de la culture par Franck Lepage
p. 8 – Éducation populaire/éducation du peuple par Christiane Maure
p. 11 – Le masque du Prince/par Marc Lacreuse
p. 12 – «C’était ça, monsieur, l’éducation populaire!» Entretien avec Christiane Faure
p. 14 – Vie et mort d’une utopie…/par Yves Lorelle
p. 18 – «Je t’aime, moi non plus»/entretien avec Robert Abirached
p. 20 – Stages de réalisation : Les coulisses de l’exploit/paroles de J-P Brière, H. Cordreaux, C. Decaillot, M. Philippe, M. Simon
p. 23 – Amateurs-professionnels : un enjeu négligé/paroles de J-P Brière, M. Philippe, M. Simon
p. 24 – Jeunesse et Sports/culture : un couple difficile/paroles de J-P Brière, H. Cordreaux, C. Decaillot, M. Simon
p. 26 – Les danseuses de la République/par Jean-Luc Galmiche
p. 28 – «Ils ne comprendront rien !»/entretien avec Gabriel Monnet
p. 35 – Rencontres de l’ARIA : Les géants de la montagne/par Valérie de Saint-Do
p. 38 – Le songe d’un été corse/par Valérie de Saint-Do/entretien avec Robin Renucci
p. 41 – Lampes allumées/paroles de René Jauneau
p.42 – Un intermittent (engagé) de l’Éducation populaire/paroles de Pierre Vial
p. 44 – Les enfants de Vilar/entretien avec Dominique Brodin (La Courneuve)
p. 47 – SAMU pour public oublié/entretien avec Bernard Bellot
p. 48 – Les enfants prodigues/paroles de Maxime Apostolo, Guy Bénisty, Claude Bernhardt, Jean Djemad, Frédéric Ferrer, Christine Pellicane, Renata Scant
p. 52 – Peuple et culture : un humanisme radical/par Céline Delavaux
p. 54 – Une passion républicaine/par Jean Caune
p. 56 – Ligue de l’enseignement : Éduquons, éduquons! par Christophe Adriani
p. 57 – Classes moyennes partout/par Fernand Estèves
p. 58 – ATTAC bouscule les bastions/paroles de Bernard Cassen
p. 60 – Brèves- Bibliographie
p. 61 – Index des noms propres
p. 62 – Glossaire des mouvements et métiers HORSCHAMP
p. 64 – SI LOIN SI PROCHE/L’exception suédoise/Par Irène Sadowska-Guillon
p. 67 – Chronique du théâtre ordinaire/Par Bruno Boussagol
p. 68 – VILLES ET FESTIVALS Présence d’ailleurs en Avignon/par Joël Cramesnil
p. 70 – PAS DE CÔTÉ/Pouvoir dire « j’arrête »/entretien avec Ea Sola
p. 71 – La société des experts/entretien avec Michel Hallet-Eghayan
p. 72 – HORS SUJET
p. 73 – PARTI-PRIS Ultra-moderne archaïsme, suivi de «Il n’y a pas que le Kärcher…» par Nicolas Roméas
p. 74 – ÉCRIT Quand le théâtre devient antisémite/par Joël Cramesnil
p. 75 – Petites théories jetables/par Jacques Livchine
p. 76 – L’art a-t-il toujours sa place aux Récollets ?

Sortie en librairies et kiosques le 20 octobre 2005, tirage limité.

Cassandre/Horschamp, Cité européenne des Récollets, 150 rue du Faubourg Saint-Martin 75010 Paris. Tél.: 01 40 35 00 98.

E-mail : cassandre@horschamp.org

Cassandre porte depuis 1995 les valeurs d’un art en prise avec la société dans la lignée des combats de l’après-guerre, fait avancer les idées et lutte contre l’endogamie. Notre travail est celui d’une « nouvelle critique » qui ne se contente pas de juger l’«objet», mais appréhende le geste de l’art en prenant en compte la relation à l’histoire, aux populations et aux lieux. Visitez le site Horschamp : www.Horschamp.org, mettez-vous même vos informations en ligne sur Passeurs: www.passeurs.org, recevez microCassandre chaque mois. Abonnez-vous à Cassandre.


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